Oliver Scala, maître du thé, a su interpréter en thés les parfums et les histoires imaginées par Catherine Laskine Balandina pour STATE OF MIND. Une aventure qu’il nous raconte ici… pour le plus grand plaisir de notre palais ! Rencontre avec un artiste peu ordinaire… au métier extra-ordinaire.
A propos de votre collaboration avec State Of Mind, racontez-nous ce qui vous a plu dans ce projet ?
Un défi insensé, traduire l’olfactif en gustatif ! Avec des objectifs de mélanges très ambitieux, atypiques !
Mettre en pratique cette citation : « le thé est un parfum qui se boit. » Approcher un vieux rêve de mon père, qui aurait voulu créer, en collaboration, un parfum au thé.Construire, créer, autour d’un projet fou, animé par une personne enthousiaste et fourmillant d’idées – Catherine – et démarré par une très grande professionnelle – Karine. Tenter de contourner l’impossible.
Comment avez- vous procédé ?
J’ai beaucoup senti, humé… puis tâtonné. J’ai beaucoup échangé avec Karine Dubreuil… en restant en lien permanent avec Catherine, pour mieux m’imprégner de la philosophie du projet. J’ai rencontré de grosses difficultés, puisque les thés aromatisés se basent sur des fruits ou des épices, très peu sur les fleurs. Il a fallu rechercher de nouveaux arômes. Et effectuer des dégustations quotidiennes pour tenter d’avance, sans lâcher.
Quel parfum de la collection vous a paru plus évident, facile à travailler et pourquoi ?
Je ne sais plus ! … Je crois qu’aucun n’a été évident ; sauf peut-être dans la tête.
« Secret of success » ou « Spontaneus generosity » ont été moins compliqués parce que s’appuyant plus sur des arômes que je connaissais mieux.
Mais chaque mélange était d’une difficulté singulière, puisque, sauf exception, on passait de mélanges à 4 ou 5 ingrédients (La norme pour nos mélanges) à parfois une dizaine, voire une vingtaine, comme pour « L’âme slave ».
Qu’avez-vous appris durant cette aventure ?
A transpirer… Plus sérieusement, ces mondes de l’olfactif et du gustatif se rejoignent.
Une dégustation de thé implique bien entendu ces deux sens (les 5 sens sont d’ailleurs sollicités), mais c’est la traduction de l’olfactif en gustatif qui a été la clef de voûte et passionnante par ce transfert. Sinon, le thé, au même titre que le vin, peut être considéré comme un parfum… mais il se boit !
Qu’est-ce qui vous plait le plus dans votre métier de maître de thé ?
Les rencontres : avec des hommes, des pays, des continents, des coutumes, leur histoire, leur présent, leurs préoccupations et leur travail. Leur passion pour un produit, le thé, qui épouse l’histoire de l’humanité, dans ce lieu magique qui nous fait vivre : la terre.
Quels souvenirs olfactifs vous servent dans vos créations ?
Inconsciemment, tous les souvenirs et sensations se retrouvent dans une création. Un gâteau, une pâtisserie, des fleurs lors d’une promenade, un marché aux épices en Inde, la confection de confitures chez une grand-mère, un dessert préparé à la maison. Notre corps et notre mémoire se sont imprégnés d’odeurs, de ces fameuses « madeleines » qui ressurgissent un jour, fugaces et fulgurantes, mais qui arrivent à point nommé.
Quels souvenirs gustatifs vous servent dans vos créations ?
Tous. Tout ce que j’ai pu goûter, découvrir, mémoriser me sert, parfois à mon corps défendant, sans maîtrise ; tout comme les sens, la mémoire est un facteur essentiel dans une création de thés parfumés.
BIO : Olivier Scala descend d’une famille qui, depuis cinq générations, importe du thé en France. Il a commencé sa carrière à 25 ans avec son père, Raymond Scala qui l’a initié au commerce du thé et à l’art de la dégustation. Olivier a pris la tête de la société George Cannon en 1988 et a développé son image et sa taille jusqu’à ce jour. Il est aussi devenu Président du «Comité Français du Thé ».
Il a initié le premier Festival du Thé à Paris en 2005. Par la suite, ce maître du thé a animé des conférences à l’Université du Thé et dans des écoles hôtelières. Son livre intitulé «Thés » est devenu une référence dans l’industrie du thé.